Cette série (c'en sera vraiment une si je guéris de ma paralysie des doigts claviéromoteurs) consiste en de courtes fables en prose, donnant lieu, à l'image du bon Jean de la Fontaine, à une chute ou une morale incontournable... Pour rendre à César ce qui est à Astérix, ce principe a notamment été utilisé (inventé ?) par un des auteurs de Pilote (feu le journal mâtin), il y a plus de 30 ans.

 

1.      "And the band begins to play"...

Où les scarabées de Liverpool inspirent de façon inattendue et en des lieux insoupçonnés des lendemains qui chantent de manière révolutionnaire.

 

Ce jour là, sur le coin de la table de la salle à manger, tout était calme. Tout... ou presque... Car, en approchant doucement, vous auriez pu entendre deux voix. Deux voix trop graciles: même si vous parliez la langue des objets, peu répandue dans l'espèce humaine, vous n'y auriez rien compris.

La salière et la poivrière étaient lancées dans une conversation animée.

"Vois-tu, SEL, ce qui rend notre vie si triste, c'est qu'il ne s'y passe pas grand chose."

"Tu as, raison, POIVRE. Même si, quand les humains sont autour de la table, il arrive que notre existence soit vraiment... secouée. Mais, le reste du temps, si j'ose dire, la vie manque un peu de ... sel..."

Les deux compères se mettent à rire, mais sont bien vite rattrapés par la tristesse et s'enferment comme d'habitude dans un silence pesant. On aurait entendu une mouche voler – image peu appropriée: à leur échelle, une mouche produit un vacarme comparable au décollage d'un Boeing en bout de piste.

Au bout d'un long silence aussi profond qu'habituel, POIVRE se met à penser tout haut:

"Ce qui nous manque, c'est un peu d'animation. Après tout, si, en l'absence des humains, nous trouvions une occupation, de préférence joyeuse, cela nous changerait la vie".

"D'accord, mais quoi ?... Pour quelle activité serions-nous assez motivés et en même temps doués ?..."

Quelques heures passent, et tout à coup, POIVRE reprend la parole:

"J'ai entendu parler (ne me demande pas comment) d'un Sergent POIVRE qui aurait créé une fanfare il y a quelques années. Si nous l'imitions et faisions de la musique..."

"Bonne idée. Mais ce n'est pas à deux que nous monterons une fanfare digne de ce nom."

"Ce n'est rien. Ne cherchons pas à égaler cette fanfare du Sergent POIVRE, dont on m'a dit qu'elle est devenue mondialement célèbre. En revanche, peut-être pourrons-nous décider quelques connaissances à nous rejoindre et à nous donner une petit coup de main..."

"A qui penses-tu en particulier ?"

"A notre ami MOUTARDE, par exemple"

"Mais tu sais bien qu'il ne parle pratiquement qu'Anglais"

"Ce n'est rien, il va bien comprendre ce Monsieur MOUTARDE moyen, que nous avons besoin d'un peu d'aide de la part des copains. Je vais lui bredouiller un truc du genre: "Mean Mr MUSTARD,.... euh j'aurais besoin d'une Little Help From My Friends,...." Et puis, on parlera par gestes...

Ainsi dit, ainsi fait... Après MOUTARDE, d'autres voulurent les rejoindre. Les frères siamois, HUILE et VINAIGRE, que personne ne se rappelait avoir vu autrement qu'accolés l'un à l'autre, se proposèrent pour l'accompagnement.

Quelques jours après, les premières répétitions commençaient. Il n'était pas facile de se procurer des  instruments:  aussi, tous tombèrent d'accord sur l'idée de démarrer par des activités purement chorales.

Tous voulaient unir leurs notes, et il ne leur serait pas difficile d'aboutir à un mélange harmonieux. Pas de doute, en associant les compères SEL, POIVRE, MOUTARDE, HUILE et VINAIGRE (et peut-être d'autres), … la sauce allait prendre

Approchons nous et essayons d'écouter une séance de travail: notre ami le Sergent POIVRE dirige les opérations et les parsème de notes piquantes. HUILE et VINAIGRE assurent un fond solide et équilibré. MOUTARDE relève le tout et assure le liant. Quand à SEL, il est omniprésent.

A la fin du morceau, c'est lui qui conclut d'une belle note, profonde, longue et soutenue...

Moralité….:

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 SEL A L'UT FINAL !...

L.M., janvier 2002